Après avoir terminé Final Fantasy XV et avant d’ouvrir Persona 5 (tous les soirs sur Twitch <3), j’ai ouvert, pour faire une transition entre deux grands JRPGs, Ryuu ga Gotoku 0 (« Comme un Dragon »), plus connu donc à l’international sous le nom de Yakuza 0.
J’étais curieux de la franchise. Ryuu ga Gotoku 7 / Yakuza : Like A Dragon était en train de recevoir des critiques dithyrambiques, tranchant avec le système de combat de ses ainés orientés action pour lui préférer du tour par tour, inspiré de Dragon Quest, dont le héros, à l’image des producteurs de la série, est fan. Cependant… je ne pouvais pas me lancer dedans avec ce jeu.
Voyez-vous, je suis complétionniste au sujet des histoires que je consomme. Un féru des expériences totales. J’aime, voire je suis obsédé, par l’idée de pouvoir comprendre les références à des événements passés, de voir le cheminement des histoires liées les unes aux autres. Je veux avoir vu tous les films Marvel dans l’ordre. Je veux me faire toutes les parties de Jojo dans le sens chronologique, même si elles sont toutes relativement indépendantes (et que les premières ont vraiment pris de l’âge). Je lis la saga The Dark Tower de Stephen King, mais ça me prend des années parce que je veux connaître tout l’univers étendu, et que ma « lecture » (audiobooks) passe donc de sept à une bonne vingtaine de romans. J’ai regretté de ne pas avoir fait NieR Gestalt avant NieR Automata pour mieux comprendre qui étaient Devola et Popola quand elles apparaissent au camp de la résistance.
Même si Yakuza 7 est un nouveau départ pour la franchise, avec notamment un nouveau héros (la saga du protagoniste historique de la franchise tenant sur Yakuza 0 –> 6), je ne pouvais pas commencer par là.
Par quoi commencer, alors ?
Sur le web, c’est la guerre à ce sujet.
Voyez-vous, c’est devenu un peu compliqué, récemment, de débuter la franchise Yakuza.
Elle a commencé sur PS2 avec Yakuza, rapidement suivi de suites et spin-offs (et même, je le découvre en écrivant ces lignes, une adaptation en film par Takashi Miike). La licence fonctionne bien (surtout au Japon), et les choses sont simples à suivre jusqu’à Yakuza 5.
Puis pour les 10 ans de la franchise, ceci dit, sort Yakuza 0.
Yakuza 0 est une préquelle à tout Yakuza. Il est écrit à la fois comme un épisode montrant au fans les personnages auxquels ils sont familiers dans leur jeunesse (et est donc construit en partie sur la question « comment sont-ils devenus les hommes des épisodes suivants ? ») et à la fois comme un épisode pouvant servir d’introduction pour de nouveaux joueurs à la franchise.
C’est un succès. C’est par cet épisode que la franchise trouve vraiment sa popularité à l’international. Sort ensuite un remake du premier jeu, Yakuza Kiwami.
Kiwami, en plus de moderniser un jeu de plus de dix ans, est réécrit pour intégrer des références aux événements de Yakuza 0. Logique. Sauf que Yakuza 0, lui même, est rempli de foreshadowing et de références que seuls les fans de la franchise pourront comprendre ! Le jeu, dans une side-story, fait littéralement apparaitre une diseuse de bonne aventure qui prédit son futur au héros, référençant des événements dont le nouveau joueur n’a bien entendu pas connaissance.
Autrement dit, pas de solution. Pas de moyen de comprendre parfaitement Yakuza 0 sans avoir joué à des Yakuza précédemment. Pas moyen de commencer par Kiwami sans rater des références à Zero.
Quel est donc le bon jeu par lequel débuter les Yakuza ? L’ordre de sortie chronologique de la série principale est :
Yakuza (PS2) > 2 > 3 > 4 > 5 > 0 > Kiwami > 6 > Kiwami 2 > 7.
Et en faisant ça, on pourrait tout comprendre ! Oui. Oui, mais bon. C’est un peu exagéré, surtout sur des jeux à la durée de vie conséquente. Je me suis donc lancé dans la franchise en profitant des réécritures et du nouveau départ du 10e anniversaire, et je prévois d’avancer dans cet ordre :
Yakuza 0 > Kiwami > Kiwami 2 > 3 > 4 > 5 > 6 > 7
Pourquoi ? Parce qu’à devoir faire des compromis, l’un m’attirait plus que l’autre.
Déjà, j’ai une très légère précision à apporter : Je ne suis pas 100% étranger à l’univers de Yakuza. J’ai rencontré les personnages de Kazuma Kiryu et Goro Majima, les deux protagonistes de Zero, dans Project X Zone 2, le RPG crossover Namco x Capcom x Sega. Ça m’a permis de savoir la chose qui est, je pense, la plus importante à savoir avant de commencer Yakuza 0 : Goro Majima est supposé être un personnage chaotique taré. Et dans Zero, il ne l’est pas. Du tout.
Ensuite, parce que même si c’est bien entendu voulu dans le cas de Yakuza 0, j’ai pu échapper à « l’effet préquelle ».
L’effet préquelle ? C’est ce qui se passe quand on se retrouve face à une histoire se passant avant des événements que l’on connait déjà. Tout personnage que vous n’avez jamais rencontré (surtout dans une saga qui compte déjà cinq autres épisodes) finira probablement mort avant la fin de l’histoire. C’est la raison pour laquelle vous entrez dans Star Wars 3 en sachant pertinemment qu’Obi-Wan survivra à son duel contre Dark Vador, mais que pour Mace Windu, c’est mal barré. Ou pour laquelle, si vous avez découvert l’univers de Tolkien au cinéma, vous saviez que Bilbo survivrait à son voyage inattendu.
Bien entendu, l’effet est souvent utilisé pour le drame… c’est même souvent l’objectif. En l’occurrence dans Yakuza 0, on se doute que certains personnages vont vivre des événements traumatisants qui vont les transformer radicalement. On redoute le moment où d’autres vont passer de vie à trépas. On vit une belle amitié en redoutant le moment où elle va mal tourner. Par exemple, tout le premier arc de Berserk se situe dans un flashback, et il s’agit de l’âge d’or du manga, au propre (c’est le titre des films de 2012 et 2013) comme au figuré.
Mais il a ses gros défauts. Rien que savoir qu’un personnage est présent dans une suite lui accorde un bouclier d’invincibilité. Difficile de trembler pour eux, dès lors, même alors qu’ils semblent en danger de mort. Inversement, difficile de s’investir dans des personnages qui semblent être promis à une mort rapide, et certains arcs scénaristiques pourront rapidement paraitre plus vains, plus « remplissage », car on peut facilement voir qu’ils vont sur une impasse. Sans compter que fonctionner avec les contraintes d’une œuvre précédemment établie peut rapidement conduire à des maux de têtes complexes à résoudre pour les scénaristes, ou donnant des impressions d’histoire alambiquées au spectateur. Typiquement, j’enrage toujours du banquet des rois de Fate/Zero, moment pendant lequel il était interdit que Saber apprenne l’identité d’Archer. Au banquet des rois.
Ai-je manqué des choses en traversant Yakuza 0 et ne le vivant pas comme une préquelle ? Certainement, mais je peux vous assurer qu’il fonctionne, et fonctionne même très bien, comme introduction à la franchise. Et en bonus, j’ai vécu de vrais moments de surprise, ou de tragédie, qui m’ont plus touché que si je m’y étais attendu.
Ah oui, quel genre de jeu est-ce ? Pourquoi est-ce que je vous le recommande ?
En parler était mon intention quand j’ai commencé à écrire… Mais face à cette introduction s’étant transformée en article complet, et face à mon propre désamour des articles fleuves… je vous propose de continuer ceci… la semaine prochaine !
Fiou, c’est poussiéreux ici! Je sais même pas si en 2021 tu devrais conserver un espace commentaire, y’a d’autres moyens de réponses maintenant et c’est potentiellement pas sain d’avoir des commentaires maintenant :p (d’autant que tu t’accordes le droit d’avoir une vraie interface de saisie pour ton article mais qu’on a droit à un pauvre textarea tout pourri pour les commentaires, ce qui sous entend que les commentaires sont pas intéressant techniquement.
Tes arguments étant contradictoires et tu l’admet donc on est bien d’accord que tu pars sur un compromis. J’ai furieusement l’impression que tu es plus sur une explication post hoc qu’un argumentaire d’ailleurs (ce que tu dis entre les lignes dans ton tweet qui se demande si c’est la même chose pour les gens qui veulent voir la saga Star Wars par la prélogie. Et c’est marrant que tu prennes cet exemple là parce qu’il est plutôt commun de considérer que l’ordre est le machete (4, 5, 2, 3, 6) (j’ai pas suivi si 7-9 étaient inclus mais j’imagine que beaucoup seront d’accord pour les mettre après s’ils sont présents). Et cet ordre a un raisonnement un peu similaire au tiens : c’est celui qui garde une partie des surprises tout en utilisant une sorte d’ordre scénaristique existant (on considère 2 et 3 comme un flashback).
Mais là où je vais pas te suivre, c’est que je ne vois que 2 choix possibles face à ce genre de conendrum :
– accepter de pas jouer à tout et louper des trucs (donc l’ordre machete qui vire le 1)
– l’ordre de sortie des oeuvres parce que c’est comme ça que la saga évolue dans le temps d’écriture parce que, comme tu le dis au début, si tu veux les refs c’est comme ça que tu peux t’y prendre.
Je suis sincèrement convaincu que si tu veux satisfaire ce genre d’obsession, la 2e solution est la seule qui vaille. Soit dit en passant, je pense vraiment que cette obsession se corrige et n’en vaut pas la peine, étant un repenti. Peut être que c’est du au fait que j’ai peu de soucis à comprendre une référence à retardement et que j’apprécie regarder des commentaires ou essais sur les oeuvres que j’apprécie qui sont pour moi une façon d’approfondir l’oeuvre par l’intermédiaire de gens qui vont y ajouter le contexte de l’époque de création, les intentions des auteurs, les histoires qui peuvent déjà exister, etc. Mais j’adhère de plus en plus à la thèse de la mort de l’auteur donc ça vient ptet de là aussi ¯\_(ツ)_/¯.
Mais à défaut, l’ordre chronologie de sortie des oeuvres est celle qui va à la fois t’éviter les spoilers (un de mes collègues fait ce que tu viens de démarrer sur Yakuza avec Fondation d’Asimov, malgré mes nombreuses recommandations de ne pas faire ça et d’à quel point c’est une connerie) et en prime te permettre d’obtenir les références. Tout auteur qui écrit une préquelle joue sur les sentiments des gens qui ont vu l’oeuvre de départ et je ne considère pas que ça soit dommage de savoir à l’avance ce qu’il va se passer. C’est une contrainte comme un autre (pas pire qu’un fusil de Tchekhov) et je citerais Memento comme preuve que c’est une contrainte très intéressante qui ne nuit pas à la narration si elle est bien faite. À l’inverse, en commençant par la préquelle pour s’offrir la surprise, c’est un peu tricher. Tu perds aussi la capacité d’empathie ou d’animosité que certains personnages peuvent t’offrir dans l’autre sens.
Vala vala, /me range un peu en partant parce qu’il faut toujours laisser un endroit plus propre qu’en arrivant.
C’est potentiellement pas sain d’avoir des commentaires, mais concrètement je maitrise tout ici (y compris de pouvoir les fermer), donc… ça devrait aller :)
Et ça donne une opportunité de se manifester par d’autres moyens d’avoir des… commentaires justement, tout le monde n’a pas non plus un compte twitter.
(Après, oui, de manière générale, les commentaires, s’ils ne sont pas forcément moins intéressants, sont par contre explicitement designés pour être moins importants :) même si je checkerai peut-être dans le futur pour voir si on peut faire mieux que ce triste textarea)
Sinon :
* Je n’ai pas vraiment l’impression que le machete, s’il a eu de la popularité dans le milieu geek, soit vraiment quelque chose de vraiment utilisé ^^
* Je suis d’accord sur le fait que l’ordre de publication est dans la plupart des cas celui dans lequel prendre les choses :) Mais j’étais ici face un cas où suivre l’ordre d’évolution *réel* supposait de partir par le jeu PS2, et il fallait prendre une décision… celle du jeu clairement designé comme nouveau point d’entrée me semblait donc approprié :) (chronologiquement, à la fois ingame et dans la réalité le « nouveau 1 » est bati sur ses fondations, et est donc en partie devenu un 2)
Et enfin, je la vis bien cette obsession (le mot était peut-être exagéré), je mets du temps et je me pose parfois un peu trop de question mais je suis satisfait de mes expériences au final, ce qui me parait être le principal :)
Bref, merci pour le commentaire intéressant (j’ai été googler « la mort de l’auteur »), et pour le rangement et dépoussiérage :D
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